Cet article présente une critique des conclusions auxquelles parvient C.Thi Nguyen (2020) dans le neuvième chapitre de Games: Agency As Art, qui met en garde contre les dangers de la ludification (gamification) de l’existence, c’est-à-dire le fait d’introduire des éléments fictifs de jeu dans la vie réelle. En mobilisant d’abord des recherches en neuropsychologie, afin de mettre en lumière les enjeux avec lesquels vivent les personnes neurodivergentes, je dénonce les présupposés capacitistes et l’ignorance neurotypique dont fait preuve Nguyen lorsqu’il aborde la ludification de la vie. Puis, je consolide ma critique en l’appuyant sur un point de vue différent, soit celui de le·a philosophe·sse Quill R. Kukla. Certes, son concept d’enchevêtrement (messiness) permet de remettre en question la vertu nguyenne de bon·ne joueur·euse. Enfin, j’atténue l’argument de Nguyen par rapport à la saisie de la valeur en avançant qu’il vise la mauvaise cible en accusant la ludification de l’existence en elle-même plutôt que les institutions néolibérales qui en instrumentalisent les atouts à des fins capitalistes et vicieuses.