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Cet essai propose une réflexion sur l’étude historique des liens entre l’Europe moderne et contemporaine et le reste du monde. Il explore les manières dont l’histoire européenne peut être intégrée à l’histoire globale, en considérant l’Europe non seulement comme un moteur, mais aussi comme un produit des transformations mondiales. À partir d’un large aperçu historiographique, l’auteur discute de l’influence du « tournant global » sur différents domaines de l’histoire européenne moderne et contemporaine, notamment l’histoire politique, économique, sociale, intellectuelle et environnementale. Il soutient que l’histoire globale représente tant un défi qu’une opportunité considérable pour les européistes d’ouvrir l’histoire européenne moderne. Cette approche nous aidera finalement à remodeler notre compréhension des frontières de l’Europe – et du domaine de l’histoire européenne lui-même. En d’autres termes, cela nous permettra de déprovincialiser l’Europe. De manière plus générale, l’essai aborde également des questions plus larges sur les continents (et d’autres unités spatiales) en tant que catégories ontologiques dans les études historiques.
L’article aborde la question d’une historiographie globale de l’Europe à partir de deux angles. Dans un premier temps, il s’attache aux difficultés, tant historiques qu’épistémologiques, à saisir l’objet Europe, notamment après les transformations historiographiques induites par 1989, l’affirmation des études postcoloniales, l’émergence progressive de la critique de l’eurocentrisme et, enfin, aujourd’hui, l’invitation à prendre le « tournant global ». Les conceptions de l’Europe qui se dégagent de ces propositions ont l’inconvénient de se fonder sur une vision de l’Europe plutôt homogénéisée, centrée sur les grands États-nations de l’Europe occidentale et leurs politiques impériales. Elles véhiculent également, tout en la critiquant, l’idée d’une modernité dont l’Europe aurait été à la fois le foyer historique et l’agent d’expansion à l’échelle mondiale. Dans un second temps, afin de circonscrire les taches aveugles inhérentes à ce genre de visions, l’article propose un déplacement du regard, en fixant le poste d’observation dans les confins orientaux et balkaniques de l’Europe, à l’intersection des trois empires austro-hongrois, ottoman et russe, pour une période équivalant au « long » xixe siècle. Ce changement de perspective fait apparaître non seulement une grande diversité de vues des acteurs locaux, mais aussi le déplacement qui s’opère dans la conception du lien entre Europe et modernité, l’importance des sociétés locales multiculturelles et pluriethniques ainsi que le rôle particulier de populations transnationales qui, comme les juifs, tout en négociant leur rapport propre à une modernité européenne, échappent à l’emprise des mouvements nationaux.
Au cours des dernières décennies, l’écriture de l’histoire européenne – qu’il s’agisse de l’histoire de l’Europe ou de celle des pays d’Europe – a connu des transformations fondamentales. Le tournant global, bien qu’il ait été adapté de différentes manières, a profondément affecté l’historiographie produite dans de nombreux pays européens. D’une part, des moments charnières de l’histoire européenne ont été réinterprétés comme parties prenantes de configurations plus larges et comme réponses aux défis mondiaux. D’autre part, il est désormais clair que la prétention de l’Europe à l’unité et à la cohésion a été renforcée notamment par des observateurs extérieurs. À la fin du xixe siècle, dans les sociétés d’Amérique latine, d’Afrique et d’Asie, les contemporains ont commencé à se référer à une « Europe » qui était moins un lieu spécifique qu’un produit de l’imagination, autrement dit : qui résultait moins de la géographie ou de la culture que de la géopolitique mondiale. Il ressort de tout cela une compréhension de l’histoire du continent qui ancre fermement celui-ci dans le contexte de conjonctures mondiales et de moments répétés de re-territorialisation.
Cet article s’intéresse à la manière dont les historiens et les économistes ont pensé l’histoire économique de l’Europe. Il remarque que les explications internes qui accordent peu d’attention au monde non européen ont dominé pendant plus d’un siècle, et passe en revue certaines des raisons de cet eurocentrisme. Cependant, un tel nombrilisme a également été de plus en plus contesté depuis un certain temps, d’abord principalement par des universitaires et des militants non européens. L’article explore enfin les débats actuels au sein de la discipline et sa reconnaissance croissante des interactions entre les économies européennes et non européennes. Deux sujets de discussion ayant joué un rôle crucial dans cette évolution sont particulièrement détaillés : la question du rôle de l’esclavage dans le développement économique européen et les riches débats qui ont lieu dans le domaine relativement nouveau de l’histoire globale du travail. Finalement, si les efforts visant à écrire l’histoire économique de l’Europe en la confinant à ses propres frontières mal définies peuvent répondre à des besoins politiques particuliers, ils sont, dans les faits, historiquement trompeurs.
La globalisation de l’histoire intellectuelle de l’Europe moderne et contemporaine est attendue depuis longtemps ; elle en est également encore à ses débuts. Cet essai distingue quatre pistes suivies jusqu’à présent par les historiens. La première correspond à une tentative de retrouver les sources et les contextes mondiaux du canon de la « pensée européenne ». Une deuxième approche consiste à redonner vie aux imaginaires globaux des penseurs européens modernes. Une troisième possibilité, plus difficile à envisager, revient à retracer la circulation des traditions de pensée et des concepts européens à travers la planète en analysant leur réception et leur refaçonnage au cours de ces voyages, tandis que des réseaux de rétroaction complexes brouillaient les démarcations entre l’européen et le non-européen. Une quatrième et dernière voie, plus controversée, insiste sur l’importance capitale du canon de pensée européen dans la compréhension des interactions mondiales passées et présentes, en soulignant qu’une partie de la valeur de ce canon réside dans le fait qu’il peut aider à corriger les points aveugles que ses propres historiens lui ont imposés en représentant, à tort, la pensée européenne comme un isolat coupé du reste du monde.
Le tournant global est au cœur de l’étude des nombreuses histoires migratoires de l’Europe – qu’il s’agisse de migrations extra-, intra- ou infra-européennes – et inclut les espaces transatlantiques, impériaux et post-impériaux ainsi que d’autres arènes mondiales. Bénéficiant d’un grand nombre de travaux novateurs souvent centrés sur des histoires au niveau macro, cet article prône un cadrage plus serré portant sur les interprétations et les expériences individuelles. Ce faisant, il soutient que les historiens peuvent ouvrir des perspectives nuancées, qui risquent cependant d’être submergées au sein d’études où, paradoxalement, les migrants réels se trouvent supplantés en raison de l’accent mis sur les phénomènes migratoires globaux. Focalisé sur la fin de l’ère contemporaine, l’article retrace les dimensions globales de deux vies s’étendant sur près de deux siècles afin de soulever des questions plus larges, notamment sur la race et l’ethnicité. Jacob A. Riis (1849-1914) et Gérald Bloncourt (1926-2018) étaient d’éminents photographes documentaires qui partageaient un profond engagement pour la réforme sociale et l’amélioration des conditions de vie de la classe ouvrière. Ils ont tous deux enregistré des histoires de migration via leurs appareils photographiques et leurs écrits, permettant ainsi une analyse des représentations multimédias issues d’une même source. Le fait qu’ils soient eux-mêmes issus de la migration (Riis a quitté le Danemark pour les États-Unis, et Bloncourt Haïti pour la France métropolitaine) donne une résonance particulière aux images et aux textes qu’ils ont produits. Leurs propres origines et leurs vies mobiles se sont avérées cruciales pour leurs interprétations des flux de personnes plus larges qui ont relié l’Europe à différents contextes mondiaux – et qui continuent de le faire aujourd’hui.
Pourquoi l’histoire européenne a-t-elle pris si tard le tournant global ? Si le passé de l’Europe s’est bien sûr toujours construit par rapport à ses périphéries islamiques ou mongoles, et plus tard par rapport à ses colonies, ce n’est que récemment que l’on a compris que l’histoire européenne et extra-européenne s’entremêlent dans une relation dynamique d’influences réciproques. L’histoire intellectuelle et économique l’a reconnu avant l’histoire sociale qui, dans son épanouissement à partir des années 1960, tenait pour acquis que les formes sociales européennes étaient à la fois plus avancées et catégoriquement différentes des autres. Dans les années 1970 et 1980 cependant, une génération après la décolonisation politique, de nouveaux travaux ont commencé à explorer l’influence des périphéries sur le noyau européen et à évaluer l’Europe de l’extérieur. Depuis le début du xxie siècle, on assiste à l’émergence d’une histoire sociale européenne globalisée. En sortant des contraintes du paradigme national, elle ouvre la voie à de nouveaux projets et méthodes historiques pan- et transeuropéens. Ceux-ci suscitent de nouvelles questions sur la façon dont nous pourrions reconfigurer l’histoire européenne de manière à comprendre l’Europe centrale et orientale selon leurs propres termes plutôt que comme de simples extensions retardées de phénomènes européens occidentaux « avancés ».
L’histoire européenne en tant que champ a été construite autour d’une idée de l’Europe – de ses frontières, de ses valeurs, de sa civilisation et de ses nationalités – structurée par le christianisme et ses héritages séculiers. Plutôt que de chercher à globaliser l’histoire de l’Europe en considérant l’influence de la chrétienté sur d’autres parties du monde, et vice versa, cet article remet en question ce récit dominant. Il se demande comment l’historiographie de l’Europe peut intégrer les historiographies des populations non chrétiennes de l’Europe, à savoir les juifs et les musulmans. Ces historiographies possèdent leurs rythmes propres, ainsi que des cadres conceptuels et des géographies spécifiques, dans lesquels l’Europe revêt des connotations très différentes ; elles déplacent notre attention du Nord et de l’Ouest vers le Sud et l’Est, nous enjoignant de penser différemment l’Europe et la diversité qui a toujours existé en son sein. Séparément, ces historiographies parlent d’expériences très différentes. Prises ensemble, elles nous aident à penser d’une autre manière l’interface entre l’Europe et le monde, et à écrire l’histoire de l’Europe elle-même à contre-courant.
Cet article soutient que les récentes histoires globales de l’Europe ne représentent qu’un mode très spécifique de conscience globale dans l’historiographie et les sciences sociales européennes. S’il ne fait aucun doute que notre compréhension du passé européen serait plus que desservie par un isolationnisme malvenu ou le simple rejet des considérables gains scientifiques de l’histoire globale, les récents changements dans les structures, les technologies et les modes de la mondialisation héritée de l’après-guerre froide nous poussent à reconsidérer la manière dont cette interconnexion globale s’est effectivement réalisée à d’autres époques et en particulier au xixe siècle. L’histoire européenne après notre plus récent « tournant global » doit tenir compte des modes antérieurs de conscience globale et examiner comment la mondialisation elle-même s’est en retour vue façonnée par cette connaissance. En effet, la compréhension passée de l’interconnexion mondiale n’a pas nécessairement favorisé l’ouverture des frontières, une interdépendance ou une fluidité culturelle croissantes. Ainsi, en réponse aux forces mondiales perçues, des modes d’organisation sociale de désintégration et de réduction d’échelle émergèrent et se consolidèrent. On a également pu assister à des tentatives de canalisation des bénéfices de ces processus mondiaux à la suite de la prise de conscience de leurs retombées potentiellement enrichissantes et déstabilisantes. Ces efforts de contrôle de la mondialisation ne l’ont pas empêchée, mais lui ont donné une forme spécifique à des moments particuliers. À titre d’exemple, l’article soutient que le demi-siècle qui a suivi la Révolution française a été le témoin de ce que l’on pourrait appeler une globalisation déglobalisante, soit un moment où l’intégration mondiale, que beaucoup considéraient comme responsable du bouleversement de la Révolution, ne s’est certainement pas arrêtée, mais s’est vue réorientée au service d’une nation souveraine par la naissance de nouveaux modes d’écriture des sciences sociales et de l’histoire.
Cette contribution cherche à évaluer l’influence du « tournant global » sur les études médiévales, et notamment sur le Moyen Âge européen. Développer des perspectives globales pour la période prémoderne constitue un véritable défi. Tout d’abord, la notion même de « Moyen Âge » est un concept eurocentrique dont application à des contextes non européens peut être critiquée. Ensuite, si l’observation de contacts et de réseaux d’échanges de grande envergure a ouvert de considérables voies de recherche en histoire prémoderne, l’importance quantitative de ces contacts reste difficile à évaluer. Enfin, il existe une tension permanente entre différentes visions de la fonction de l’histoire (médiévale) dans la société. Malgré ces problèmes, les récentes contributions au « Moyen Âge global » ont ouvert de nouvelles approches à des phénomènes qui sont tout aussi pertinents pour les études médiévales européennes. Si le tournant global ne remodèle pas entièrement l’histoire de l’Europe médiévale, il ajoute certainement des nuances importantes et de nouvelles perspectives à de nombreux sujets qui non seulement résonnent avec les intérêts actuels, mais ont longtemps été une préoccupation de l’histoire médiévale européenne, comme la migration, le commerce et la religion. En dépit des difficultés et des défis (méthodologiques, linguistiques, etc.) qu’il pose, le tournant global a le potentiel de contribuer au développement de nouvelles approches thématiques ainsi que de nouvelles formes de coopération dans le domaine des études médiévales.
La profession d’historien est apparue en Europe au xixe siècle, en même temps que l’émergence de l’État-nation. Les historiens de la période moderne et contemporaine se sont surtout concentrés sur l’histoire politique des États-nations et l’histoire diplomatique des relations entre eux. Les aspects globaux de l’histoire européenne ont principalement été abordés sous l’angle de l’influence de l’Europe sur d’autres parties du monde, comme dans la « double révolution » d’Eric Hobsbawm (les répercussions mondiales de la Révolution française et de la révolution industrielle) ou l’histoire des possessions coloniales de l’Europe. Pourtant, de nombreux développements clefs dans l’Europe des xixe et xxe siècles, du libéralisme des révolutions latino-américaines des années 1820 aux retombées économiques de la culture du coton adossée à l’esclavage dans le Sud des États-Unis, furent manifestement sensibles aux influences mondiales. Les processus de globalisation de la fin du xxe siècle ont permis de les mettre en lumière et ont alimenté une approche qui place l’histoire de l’Europe dans un contexte global d’interaction mutuelle. Pourtant, l’État-nation n’est pas mort, et les gouvernements nationaux encouragent vigoureusement un retour aux histoires nationales au service d’une éducation patriotique. Si l’histoire globale n’est pas appelée à disparaître, sa place dans le système éducatif, en particulier dans les programmes scolaires, reste fortement contestée.
Histoire de l’Europe, histoire européenne (comptes rendus)